Calligraphie de racines…

Au Jardin botanique de Montréal, décembre 2022

la calligraphie des racines,

à ras de pages de terre…

témoignage du temps qui passe…

au rythme des saisons,

ici et là sur la surface de mon coin du monde


Sur le bord du lac Ontario, fin d’été


Au cœur de l’automne, au Jardin botanique de Montréal


Au début de décembre, les premières neiges annoncent l’hiver à Montréal


Le printemps, au Square Saint-Louis, à Montréal

Quelques épiphanies : le bonheur au quotidien

Comment je me situe dans l’univers

Mi-février, assis au chaud dans un café, je contemple, le regard vide, au-delà de la fenêtre givrée, le vent balayer la neige sur la rue. J’aperçois un passant quelconque : soufflant son haleine glacée au rythme de son pas alerte, le dos courbé contre le vent, les mains dans les poches, le cou enfoncé dans les épaules de son coupe-vent… Un instant saisi, figé, dans l’évolution de l’univers… sans retour.

devant le café

un jeudi matin d’hiver

l’éternité fige


Mi-mai, délesté des pelures vestimentaires hivernales sur ma peau, je prends du temps pour remuer la terre de mon jardin ; je fais une pause pour contempler mon travail ; je savoure de vieux souvenirs qui surgissent de mon enfance, lorsque je me perdais dans mon imagination, dans la cour derrière chez-moi ou dans un bosquet au parc.

ombres en dentelles

apparaissent les bourgeons

se déboutonner

les bourgeons s’éclatent

le temps glisse entre mes jambes

je danse au présent

***

les fleurs applaudissent

toutes couleurs éclatantes

sur voûte azurée


Au creux de l’été, je marche sur le trottoir dans mon quartier ; une chaleur humide flotte sur ma peau ; le long zizillement des zigales me distrait de ma rêverie éveillée ; je ralentis mon pas…

une brise chaude

molles caresses humides

seconde éternelle

un temps écrasant

poussière d’éternité

mon regard s’échappe


Octobre, novembre, les journées s’écourtent, je prépare le retour de l’hiver… Je range les bûches à côté de la cheminée. Je m’enfonce dans mon fauteuil…

feuilles retournantes

vif sursis éblouissant

rides automnales

ombres allongées

des branches dépareillées

bise pénétrante

les souvenirs filent

tout comme l’eau sous les ponts

le temps passe vite


À l’automne de ma vie, je me promène sur le bord de la mer ; je contemple les vagues qui s’écrasent sur la plage, le temps qui passe ; j’observe les débris qui jonchent mon parcours, je contemple le chemin que j’ai tracé dans l’univers ; je ne regrette rien…

Enfin, même retraité de la vie active, je peine à me délester suffisamment l’esprit pour retrouver ces états de grâce dont j’ai conservé le souvenir… il y a si longtemps. Cette impression de trouver ma place dans l’univers.

un regard distrait

leste pas douce cadence

éternel retour

ralentir le pas

cesser de compter les heures

surprise au détour

le dos au passé

sens unique du présent

le futur qui s’ouvre

=====

Il y a un demi-siècle aujourd’hui…

La tempête du siècle, le 4 mars 1971

Les vieux ( c’est à dire, les plus de soixante ans ) se souviendront d’une tempête qui nous a tous marqués dans notre coin de l’univers. Sur une période de trois jours, cette tempête avait versé plus d’une quarantaine de centimètres de neige sur le nord-est du continent, du sud du Québec jusque dans les provinces de l’Atlantique et les États de la Nouvelle-Angleterre. Des rafales de vents violents atteignant par endroit jusqu’à une centaine de km/h avaient, par endroit, soufflé cette neige jusqu’au deuxième étage de plusieurs maisons. Nous avions tous été pris par surprise. Plusieurs employés ont dû dormir sur leurs lieux de travail et des écoliers ont passé la nuit dans les salles de classe ou les gymnases.
— Consulter les liens ci-bas pour plus de renseignements et images de cette tempête :

À cette époque, je partageais, avec des amis, un appartement au deuxième étage d’une maison, sur la rue Besserer, dans le quartier de la Côte de sable, à Ottawa. Nous avions assez de provisions sur les étagères et dans le réfrigérateur pour durer quelques jours. Entre les bulletins de nouvelles à la radio que nous captions de temps à autre pour nous tenir au courant de l’actualité, nous avons écouté et réécouté notre collection de vinyles tout en lisant ou en jasant de choses et d’autres, jour et nuit, au chaud, dans un nuage d’odeurs variées, de cuisine, de thé et de café, d’alcool et de cigarettes et autres fumées…

À la fin de la tempête, tôt le matin, j’étais sorti pour contempler l’état des lieux : tout était d’une blancheur éblouissante.
On commençait à dégager les principales artères urbaines. J’avais réussi à exécuter péniblement quelques pas à travers les amoncellements de neige sur la rue vers la première intersection, assez pour me convaincre que j’avais pris la mesure de tout ce que j’avais à comprendre.
À l’intersection de l’artère principale, j’ai bifurqué à droite, allongé quelques pas supplémentaires, jusqu’au petit restaurant, une pièce, sans prétention, deux tables, quelques tabourets ; trois femmes d’un certain âge, se partagent l’espace de la cuisine derrière le comptoir. Elles y attendaient leur clientèle habituelle.
J’ai pris le temps de savourer un déjeuner, au comptoir : deux œufs, des rôties, un café…
Voici ce que j’ai griffonné de retour chez moi :


l'après-tempête façonne tout un parc,
sous une pleine-lune

sur une côte de sable


au lever du jour,
trois vieilles enneigées y dissipent les temps

on y entre : trois tantes y ont le temps
on y parle : on y devise du passage de la tempête

et pendant qu'on y placote le quotidien
avec l'âge des temps, deux œufs et un café

la gentillesse ordinaire du long temps des âges


Côte de sable, Ottawa, Hiver 1973

Jardin de lumière – 2018

Un essai photographique, pour le plaisir de l’oeil : prises d’images à l’automne 2018, dans le jardin japonais du Jardin botanique de Montréal, en soirée, dans le cadre de l’événement Jardin en lumière.

archéologie urbaine

Archéologie urbaine
en passant par là

couches incrustées

passé composé s’efface

trompe l’œil présent

Anticipation

L’érablière

D’ici quelques jours, la sève commencera à monter dans les érables.

Selon l’humeur des jours, la neige déjà humide s’évaporera au soleil, ou fondra avec la pluie, pénétrera dans la terre, coulera dans les ruisseaux, remplira les rivières…

Les ours se réveilleront ; les pic-bois tambourineront goulûment sur les arbres infectés d’insectes ; quelques semaines plus tard, les bernaches nous signaleront qu’elles reviennent de leur long séjour aux États du sud.

Le froid intense de l’hiver qui s’essouffle progressivement s’inscrit déjà dans les archives de nos mémoires.

La vie renait de la désintégration inhérente au brassage éternel de la matière.

Désordre
Le chaos s’impose sur l’ancienne cabane à sucre

à suivre…