Au printemps dernier, nous avons longé la côte atlantique de l’Amérique du Nord, de la Floride jusqu’au New Jersey… lentement…
Cinq jours pour se rendre en Floride ; huit semaines pour revenir.
Puisque pour nous, ce voyage en était un qui, conceptuellement, s’accomplirait du sud vers le nord, il nous a fallu se rendre en Floride pour l’amorcer. C’est ainsi que nous avons d’abord télescopé le printemps, passant de l’hiver à l’été en cinq jours.
Il y avait de la neige jusqu’aux genoux devant notre logis et il faisait -12 C lorsque nous avons quitté Montréal, à la fin du mois de mars. Cinq jours plus tard, à la veille du premier jour d’avril, nous nous installions sur le bord du Golfe du Mexique, au camping du Parc Fort de Soto, à quelques kilomètres au sud de St. Petersburg.

Jour 1 : État de New York
Nous quittons Montréal vers 10 h 00. Une heure plus tard, nous atteignons la frontière américaine… Il n’y avait pas foule. Normalement, à cette époque de l’année, les Québécois et autres habitants nordiques qui passent les mois d’hiver au Sud traversent dans le sens contraire. Ils reviennent de leur séjour. Le passage s’avère être pratiquement une formalité : l’agent de la douane américaine a probablement pris pour acquis que nous en avions assez de cet hiver qui se prolongeait, sans laisser quelque signe de vouloir lâcher prise. Il n’avait pas entièrement tort. Mais il ne pouvait pas savoir que nous avions planifié ce voyage depuis plus d’un an. Que c’était pour des raisons strictement d’ordre logistique que nous n’étions pas partis un mois plus tôt.
Nous n’avions jamais roulé sur l’autoroute I-87 ( New York ), qui prolonge l’autoroute 15 (Québec) vers le sud. La I-87 serpente entre le lac Champlain à la gauche et les montagnes des Adirondacks à droite, traversant l’État de New York, du Québec jusqu’au New Jersey. On y a aménagé beaucoup de relais où s’arrêter pour « texter » le long de cette route. Mais, en hiver, les restaurants où on peut bien manger sont rares entre Plattsburgh et Albany. C’est par hasard que nous avons trouvé le George Henry, un établissement agréable et de bonne qualité ( sortie 23, à Warrensburg ), qui offre une table intéressante, mettant en vedette des aliments préparés localement, incluant des bières artisanales, pour un prix raisonnable.
Nous reprenons la route. La température s’adoucit progressivement. Au-delà d’Albany, il ne reste que des parcelles de neige au sol, surtout dans les endroits ombragés. Le paysage se dessine en multiples teintes de bruns.
En fin d’après-midi, nous atteignons la région de West Point. Nous avions repéré un motel quelques jours plus tôt, avant de partir. Rien de luxueux… l’essentiel pour la nuit.
La température se maintient plus ou moins autour du point de congélation pendant la nuit.
Deuxième Jour : Le New Jersey, le Delaware, le Maryland et la Virginie
Les dernières traces de neige au sol disparaissent lorsque nous arrivons au New Jersey. Nous quittons la vallée du fleuve Hudson pour amorcer la traversée du corridor urbain entre New York et Richmond VA. Nous savions que la journée serait longue. C’était sans compter les embouteillages.
On nous avait recommandé de passer par l’autoroute Insterstate 287 afin de rejoindre la 95, puis le New Jersey Turnpike. Mais notre appareil de navigation par GPS nous guide plutôt sur la route US 17, un raccourci.
Erreur…
Nous nous retrouvons dans un embouteillage, immobilisés, pendant deux heures. Nous décidons de rebrousser chemin, afin de retrouver le trajet qu’on nous avait recommandé initialement. Le reste de la journée se déroule sans histoire. La circulation est dense, mais relativement fluide, avec des ralentissements pour contourner les grandes villes.
Nous naviguons dans le réseau des autoroutes américaines afin de contourner les villes de Philadelphie, de Baltimore et de Washington : les Interstate 87, 287, 95, 295, et enfin de retour sur la I-95.
Il n’y a plus de neige sur le sol, mais les arbres sont toujours dénudés.
Le début du printemps arrive à la fin du deuxième jour de notre route : c’est lorsque nous passons du Maryland à la Virginie, en fin d’après-midi, qu’on aperçoit enfin les premiers bourgeons sur les arbres.
On loge encore une fois dans un motel, à une trentaine de kilomètres au nord de Richmond, en Virginie. À notre descente de voiture, nous sommes surpris de sentir la chaleur dans l’air. Mais on estime qu’il est toujours trop tôt pour camper.
Le motel est plus luxueux, mais moins cher que celui de la nuit précédente. On cherche à attirer et à retenir les retraités migrateurs, tant québécois, canadiens qu’américains, qui retournent vers le nord, à la fin de leur séjour de quelques mois en Floride.
Jour 3 : Virginie, Caroline du Nord et Caroline du Sud
Il commence à pleuvoir lorsque nous reprenons la route vers 10 h 00. Nous contournons Richmond. La pluie, diluvienne le matin, s’atténue, puis cesse en début d’après-midi.
Les bourgeons s’éclatent et deviennent des feuilles, d’un vert timide, des points sur les branches, qui dessinent un paysage impressionniste. En après-midi, nous apercevons les premiers arbres en fleur.
Chemin faisant, je contemple le paysage de chaque côté du corridor routier, qui devient plus végétal, moins urbain. En Virginie et en Caroline du Nord, il me semble que la Interstate I-95 longe une ancienne route ; on remarque la présence d’un grand nombre de motels, de restaurants, et de stations services abandonnées ; les portes et les fenêtres sont couvertes de contreplaqués. Les grandes chaînes d’hôtels, de stations service et de restaurants ont remplacé les commerces équivalents locaux, tout en se rassemblant autour des sorties des autoroutes.

J’examine les panneaux publicitaires. Bien entendu, on y annonce tous les services reliés aux déplacements routiers : hébergement, nourriture, essence, médias (postes de radio et de télé). Une partie importante de cette publicité est aussi axée sur la sécurité : financière (produits d’assurance, de crédit), militaire (recrutement, services aux vétérans), spirituelle (églises et messages religieux), santé (traitements pour la ménopause, vasectomies, dentistes)… sans oublier les besoins fondamentaux, tels que les établissements réservés aux gentlemen, entre autres.
Toute la journée, on observe un flot soutenu et rapide de véhicules récréatifs qui remontent vers le nord.
Bien que le ciel reste couvert presque toute la journée, la route est agréable. Nous décidons de rouler plus longtemps que prévu et nous nous rendons jusqu’à Florence, en Caroline du Sud. Nous choisissons un hôtel qui annonce un rabais de 25 % sur ses tarifs réguliers — un établissement encore plus luxueux que celui de la nuit précédente, pour un prix équivalent, encore moins dispendieux que celui de la première nuit.
Jour 4 : Caroline du Sud, Géorgie, et Floride
Dimanche matin. Une belle journée sans nuage. Le soleil sature les couleurs du corridor routier. Le vent rafraîchit l’air ; nous avons néanmoins l’impression de traverser le mois de mai en moins de 24 heures.
Les feuilles cachent les branches des arbres et les premières fleurs surgissent au cours de la quatrième journée, alors que nous traversons la Caroline du Sud et la Géorgie.
La journée se passe sans histoire. Le flot de véhicules récréatifs s’active en même temps que la circulation générale vers la fin de l’avant-midi. Au restaurant, un restaurant mexicain, le midi, c’est le repas de famille dominical. En fin d’après-midi, nous décidons de maintenir notre rythme et nous demeurons une heure et demi de plus que prévu sur la route.
Pour la première fois, nous passons la nuit dans notre autocaravane. C’est au camping KOA de St. Augustine que nous amorçons la transition entre l’hiver et l’été : rangement des vêtements chauds, vidange de l’antigel et nettoyage des conduites et réservoirs d’eau dans le véhicule.
La nuit est agréable. Nous laissons d’ailleurs une fenêtre ouverte pour faire circuler l’air.
Jour 5 : Floride
Il fait déjà chaud lorsque nous sortons de l’autocaravane, après une bonne nuit de sommeil. Dernière journée sur la route.
À la hauteur de Daytona, nous bifurquons de la Interstate 95 pour nous engager sur la 4 en direction du Golfe du Mexique. Après le lunch, nous traversons la ville d’Orlando, sans nous arrêter. Deux heures plus tard, nous piquons à travers Tampa, puis St. Petersburg sur le réseau des autoroutes qui nous amènent à destination, vers 16 h 00, au parc du Fort De Soto, à la fin d’un périple d’environ 2 800 km.
C’est l’été. La température oscille autour de 25 C en fin d’après-midi, lorsque nous nous installons sur notre site de camping.
Une réflexion sur “De l’hiver à l’été en cinq jours”