
le dos au passé
sens unique du présent
le futur qui s’ouvre
Les neurones fonctionnaient en mode ralenti ce matin-là, il y a quelques semaines, lorsque je suis parti, tôt le matin, pour me rendre à ma session hebdomadaire de tai chi taoïste.
Il y a trois ans, j’ai quitté la région de la capitale fédérale, où je suis né et où j’ai vécu presque toute ma vie adulte. Au début de la retraite, j’ai déménagé mes pénates à Montréal. J’ai quitté une région que je connaissais très bien, à tous points de vue, pour me lancer à l’aventure dans un univers qui, bien qu’il ne m’était pas étranger, n’en demeurait pas moins très différent.
J’ai choisi de m’installer dans l’est de la ville, dans l’arrondissement de Rosemont — Petite-Patrie. Je cherchais un milieu au sein duquel je me sentirais chez-moi. Je ne me suis pas trompé.
Néanmoins, c’est tout un défi que d’adopter une nouvelle ville, surtout une ville aussi diversifiée et complexe que Montréal ; une ville qui évolue rapidement.
Chaque année, de la fin février jusqu’à la fin avril, le Jardin botanique de Montréal libère des centaines de papillons, d’une grande variété d’espèces, dans sa Grande serre. Cette année, les organisateurs de cette exposition très attendue nous proposent de porter notre attention sur les couleurs des papillons.
Il y a deux jours, les Amis du Jardin ont présenté un atelier d’une soirée en lien avec cette exposition. Cet atelier a permis aux curieux de mieux connaître ces merveilleuses petites bibites volantes, si attachantes, et si précaires.
La soirée a débuté avec une présentation d’une naturaliste de l’Insectarium, qui nous a expliqué d’où vient la palette des couleurs de ces papillons, qui nous ravissent et nous égaient. Ensuite, on a offert à la vingtaine de participants qui s’étaient inscrits à cet atelier le privilège d’aller les admirer dans la Grande serre, après l’heure de fermeture du Jardin, en début de soirée. La naturaliste nous a accompagné tout au long de la visite, pour répondre à nos questions et attirer notre attention sur des aspects qui échappent aux non-spécialistes que nous sommes.
le temps d’un clin d’oeil
l’ondée tache l’horizon
ombre passagère
Il y a des voyageurs pour lesquels la destination est un prétexte pour rouler. Ils ne s’arrêtent que pour faire une pause, délier un peu leurs jambes, manger, dormir, puis repartir, jusqu’à destination.
Bien souvent, ils ne s’arrêtent même pas pour visiter les villes ou villages qu’ils contournent ou qu’ils traversent, en ralentissant, lorsque la prudence ou le règlement l’exigent.
Leur plaisir, c’est de s’enfoncer dans les paysages qui défilent devant eux, tel un film. Les amateurs de motos font partie de cette tribu. Souvent même, ces voyageurs n’ont pas réellement de destination. La route est leur destination, une fin en soi.
J’aime la route, contempler les paysages, en découvrir de nouveaux. Mais, pour moi, la route ne constitue pas la raison en soi du voyage. Parfois même, le déroulement incessant du ruban d’asphalte me lasse à la longue.
Il y a une dizaine de jours, le quotidien Le Devoir a publié un texte de Christian Rioux : Obsédé par l’Islam… vraiment ? ( article publié le 26 février, accessible en ligne uniquement aux abonnés ). Le chroniqueur y fait état d’une étude effectuée par deux sociologues, Céline Gofette et Jean-François Mignot, sur les unes de Charlie Hebdo depuis dix ans.
Cette étude nous révèle que l’Islam a toujours été un thème très marginal dans Charlie Hebdo. Sur 523 unes, 336 ont été consacrées à des personnalités politiques, principalement à Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen, 85 à des sujets d’actualité économique et sociale, et seulement 38 sur la religion.
Sur ces 38 unes consacrées au thème de la religion, 21 s’attaquaient à l’Église catholique. Sept ont été consacrées à l’Islam, soit trois fois moins qu’à l’égard du Catholicisme.
Je suis convaincu que ni le pape, ni les hommes et femmes politiques français n’ont, à quelque moment donné, songé à tuer pour châtier un blasphème, ou un crime de lèse-majesté.
Doonesbury est une bande dessinée qui est publiée dans des centaines de quotidiens anglophones d’Amérique du Nord depuis plus de quarante ans. J’y suis devenu accro depuis que je l’ai découvert, dès ses débuts.
Le créateur de cette bande dessinée, Gary Trudeau est un véritable chroniqueur, qui utilise ses crayons et ses plumes pour tracer l’évolution de la société américaine : son regard acéré, toujours pertinent, bien que biaisé au centre gauche, n’épargne personne — ni la faune politique et leurs thuriféraires des médias, ni les milieux d’affaires, ni surtout les charlatans de toutes sortes.
Pendant longtemps, j’ai lu Doonesbury sur une base quotidienne. Aujourd’hui, c’est devenu une habitude dominicale ; chaque dimanche matin, j’ouvre l’édition numérique du New York Times. Après avoir parcouru la une en diagonale, je me dirige directement à Doonesbury.
Hier, il m’a étonné, encore une fois. C’est un point de vue typiquement américain, cet aspect décontracté que nous aimons tant chez nos voisins, que j’ai retrouvé en lisant cette bande dessinée hier matin.
Un hommage sympathique aux caricaturistes de Charlie Hebdo : en quelques cases, il y évoque leur œuvre, s’attachant à leurs sujets favoris — le pape, les politiques français, et autres, jusqu’à l’avant-dernière case. Il y fait référence à Mahomet, sans le représenter, s’attaquant plutôt aux fanatiques qui prétendent le défendre.
C’est dommage qu’on ne puisse marginaliser aussi facilement tous ces intégristes qui ébranlent le monde, et nous empêchent d’en jouir depuis toujours.
D’ici quelques jours, la sève commencera à monter dans les érables.
Selon l’humeur des jours, la neige déjà humide s’évaporera au soleil, ou fondra avec la pluie, pénétrera dans la terre, coulera dans les ruisseaux, remplira les rivières…
Les ours se réveilleront ; les pic-bois tambourineront goulûment sur les arbres infectés d’insectes ; quelques semaines plus tard, les bernaches nous signaleront qu’elles reviennent de leur long séjour aux États du sud.
Le froid intense de l’hiver qui s’essouffle progressivement s’inscrit déjà dans les archives de nos mémoires.
La vie renait de la désintégration inhérente au brassage éternel de la matière.
à suivre…